PETER FLEMMING
Instrumentation
2013
Biographie
Peter Flemming est un artiste canadien qui crée des installations sonores kinétiques situationnelles explorant la résonance par des matériaux activés électromagnétiquement, des performeurs mécaniques et des dispositifs d’amplification improvisés. Ses œuvres antérieures incluent des dispositifs de lévitation paresseuse, des machines à chœurs alimentées par l’énergie solaire, des automates répétitifs hypnotiques. Il expose abondamment sur la scène internationale et s’est vu attribuer plusieurs bourses et résidences.
À propos de l'œuvre
Toute chose possède une fréquence de résonance naturelle. Ce qui est fascinant, c’est que cela suggère l’existence d’une connexion de base reliant presque tout, tout en restant matérielle. L’eau dans une coupe à vin vibre intensément lorsqu’on passe son doigt sur le bord du verre. Nos corps ont des fréquences de résonance; il en va de même de l’agrafeuse sur mon bureau, des gratte-ciels du centre-ville, du pont que je traverse quand je quitte Montréal, des plaques tectoniques qui supportent tout cela.
Inspirée par cette résonance, Instrumentation est une installation sonore kinétique qui varie en fonction des sites. En entrant dans l’espace principal de l’installation, on entend une polyphonie dansante d’harmonies, de crescendos soudains et de sons arythmiques.
Aux antipodes de ces élégants sons, on retrouve les improbables résonateurs d’où ils émanent, bricolés à partir de retailles de bois, pinces, seaux, tambours, fenêtres récupérées et bobines électromagnétiques à mouvements mécaniques.
La suite de l’exploration révèle une pièce secondaire contenant la source de la performance : un étalage de petits dispositifs mécaniques et de câblages apparemment assemblés au hasard. Une grande table de bois tient lieu de scène pour ces performeurs non humains. Un levier tire une corde fixée à un électrode à ventouse dans un bocal d’eau salée électrifiée. Le cadran d’un gradateur de lumière tourne lentement, contrôlé par un petit moteur. Des champs électromagnétiques vibrants font résonner des cordes de piano et créent des impulsions percussives sur des tambours et des boîtes de métal. Des couvercles de pots de yogourt fixés à des bâtons se balancent d’avant en arrière au-dessus de senseurs de lumière. Tous ces éléments se combinent pour composer spontanément le refrain hypnotique de Instrumentation.
L'un des principaux objectifs que je me suis fixé en tant qu'artiste est de construire des systèmes que je ne comprends pas entièrement, dont je ne peux pas prédire entièrement le comportement. Dans Instrumentation, des cycles se superposent, se synchronisent et tombent en décalage, générant ensemble une trame sonore fluctuante infinie. Les actions répétitives de chaque performeur résultent d'une manifestation de l'horloge, dispositif numérique fondamental. Je choisis de travailler directement avec l’horloge comme avec des cubes de construction, bâtissant lentement une complexité par superposition.
Ceci contraste avec l’approche consistant à commencer par monter un ordinateur complet autour de l’horloge, pour ensuite travailler à contre-courant, par des opérations logicielles complexes, à ré-introduire artificiellement des éléments de surprise ou des comportements chaotiques. Dans Instrumentation, le comportement algorithmique est attribuable à des objets matériels, non pas à du code abstrait. En ce sens, je considère Instrumentation davantage comme une structure, schématique, que comme une œuvre pleinement individualisée et fermée. Structurée mais pas scénarisée, l’œuvre comporte une grande part d’improvisation; ainsi, elle varie significativement d’une installation à l’autre.